Le grand quoi
Le grand quoi
(Gallimard)
Poignante épopée contemporaine d’un gamin soudanais chassé d’Afrique par la guerre mais surtout chronique authentique de la vie de Valentino Achak Deng.
La force de ce roman c’est de commencer par la fin : Valentino Achak Deng , émigré soudanais à Atlanta se
fait sauvagement braquer dans son deux-pièces par des Afro-Américains pour un simple poste de télévision et un lecteur de DVD. Cette jungle urbaine rappelle cruellement à Valentino ce qu’il a
vécu et saucissonné dans son appartement, c’est sa vie qui défile devant lui : sa famille décimée devant ses yeux, dans son village, par des milices armées car le gouvernement islamiste du
Nord s’est soudain intéressé au pétrole du Sud, zone chrétienne. Sa fuite, de frontières en déserts, à la recherche d’une terre d’accueil alors qu’il
n’a que huit ans. Il repense à sa peur du lion qui attaque, la nuit, aux enfants perdus dans la brousse comme lui qui dorment serrés les uns contre les autres pour ne pas avoir froid ni mourir
seuls. Il atterrit dans un premier camp de réfugiés en Ethiopie, camp qui sera attaqué. Nouvelle
fuite pour enfin passer dix ans dans le camp de Kakuma au Kénya où il trouve une famille d'adoption. Les compagnons d'infortune de Valentino
deviennent enfants-soldats. Lui résiste, car il veut aller à l'école. Enfin il décroche le sésame : un visa pour l'Amérique. Après des années d'attente, il y débarque au matin du
11 septembre 2001, persuadé qu’il arrive dans un pays en guerre et que partout où il passe il porte la poisse.
Pendant quatre années, Dave Eggers a recueilli le récit de Valentino. Il a réussi à en faire un récit brut et fort, sans aucun misérabilisme. C’est surtout une leçon de courage et un magnifique
hymne à la vie. Il faut noter que Dave Eggers reverse la totalité de ses droits d’auteur à Valentino qui s’en sert pour construire des écoles au Soudan. En trois ans, il a fait davantage pour son
pays que la myriade d'ONG locales plus ou moins corrompues qui s'épuisent sur le terrain.
Avis du libraire : l’homme est un loup pour l’homme, on le sait mais à ce point…
Un livre inoubliable
Prix Médicis Etranger 2009 à l’unanimité